Le pétrole en mode propulsion

La courbe parle d’elle-même : le pétrole (WTI ou BRENT) est en mode propulsion, et ce depuis 2016. Avec $75 actuellement, le WTI a fait une performance de plus de 150% depuis les niveaux à $30 début 2016. Au niveau visuel et graphique, ça n’a pas l’air de vouloir s’arrêter là. Même chose pour le benchmark international Brent qui est avec un prix de $84, progresse de près de 190% depuis le point bas !

Évolution relative du prix du baril de pétrole WTI (en bleu) et Brent (en rouge) depuis le point bas :

Évolution du prix du baril de pétrole WTI depuis 15 ans :

Mais qu’en est-il de l’offre et la demande, au niveau fondamental ? Pourquoi les prix grimpent comme ça ?

Les producteurs de pétrole s’étaient réunis dernièrement et avaient décidé de limiter la hausse des prix en augmentant leur production. Ainsi, les membres de l’OPEP (Organisation des Pays Exportateurs de Pétrole) ainsi que la Russie s’étaient mis d’accord. Par ailleurs, le président américain Trump s’est plusieurs fois exprimé en faveur d’une baisse des prix du pétrole.

Néanmoins, les prix ont continué leur envolée. Plusieurs facteurs contribuent à cette situation.

Tout d’abord, la production de certains pays a largement baissé ces derniers mois, comme celles de l’Iran, de la Lybie et du Venezuela, pour des raisons de crises et de guerre évidente. Certes ce ne sont pas les plus gros producteurs, mais mis bout à bout, la tension se ressent sur les marchés.

En particulier, l’Iran étant la cible de Trump, ce pays a de plus en plus de mal à vendre son pétrole à causes des sanctions américaines. Cela provoque un besoin supplémentaire que des producteurs comme la Russie ou l’Arabie Saoudite doivent combler. Ont-ils la capacité nécessaire pour y faire face ? Probablement, mais au dépend des réserves de sécurité.

Pour le moment, il n’est pas question de pénurie de pétrole. Cependant, il n’y a pas de surplus évident et les tensions ne risquent pas de se dissiper à court terme. Certains analystes voient le pétrole dépasser les $100 si les diverses situations préoccupantes ne s’améliorent pas, ceci mis en face de la demande croissante en énergie liée à la croissance globale de l’économie.

On voit que le marché pétrolier est très sensible aux situations politiques des pays producteurs mais également aux positions et discours des hommes politiques eux-mêmes, dont Trump est le parfait exemple. Celui-ci n’hésite d’ailleurs pas à encourager ouvertement le roi saoudien à accroître la production de pétrole du royaume.

Quand on parle du loup…

Je parlais du pétrole en mode propulsion le 3 octobre, date du plus haut observé sur le pétrole, lorsque le WTI a atteint les 76$. Depuis, c’est la dégringolade : près de 33% de baisse !

Les fondamentaux économiques et de l’offre et demande ont parlé, au-delà des rumeurs et situations géopolitiques. En effet les prévisions macro de sont pas forcément joyeuses et devraient faire chuter la demande à moyen terme, notamment en 2019. La production de pétrole, quant à elle, reste malgré tout importante et devrait en tous les cas grandir plus vite que la demande.

Dans ces conditions, les membre de l’OPEP (Organisation des pays exportateurs de pétrole) devraient bientôt s’accorder pour limiter la production et ainsi éviter un flux d’or noir inutilisable, et limiter la chute des prix.

Mais les mouvements de marché actuels (à la baisse donc) ne sont pas simplement le fruit d’un ajustement de l’offre et de la demande. Ce marché est très spéculatif. Des gros investisseurs ont coupé leur position « Long » (acheteuse) et d’autres ont encore initié des positions « Short » (vente à découvert). Sans parler des algorithmes et autres robots qui ont certainement accentué davantage la chute.

A partir de là, dur de dire et prédire ce qu’il va se passer : une tendance baissière moyen terme ? Un réajustement à la hausse ? Quoi qu’il en soit, la volatilité devrait continuer d’être assez élevée, source de d’opportunités pour les traders.

Au niveau graphique, c’est plutôt joli. Le tunnel haussier initié début 2016 a été perforé en bonne et due forme ! On ne voit pas ce qui pourrait arrêter la descente avant les 40$…

Où en est-on huit mois après sur le pétrole US (WTI) ?

L’or noir est venu titiller les $43 en décembre 2018 avant de remonter à $66 en avril 2019, soit une progression de +53% en 4 mois. Pas mal. En passant, il est intéressant de noter qu’à $66, le cours à heurter l’ex-support qui est devenu résistance… comme quoi la technique peut marcher… (toujours plus facile à constater après coup néanmoins)

En ce moment le pétrole hésite entre $50 et $60.

Très sensible à la géopolitique, le pétrole peut très bien s’enflammer si des tensions internationales venaient à se concrétiser… Il est bien sûr également sensible aux fondamentaux d’offre et demande… et des ajustements malins des pays producteurs qui régulent à leur guise les niveaux de productions.

A partir de là, difficile donc de prédire où le pétrole va aller les prochains mois.

Une alternative à cette approche purement directionnelle (de pari en quelque sorte) est de raisonner en relatif. C’est-à-dire qu’au lieu de regarder uniquement le WTI, on va l’analyser par rapport à d’autres marchés, matières premières ou autres. On peut par exemple étudier le rapport du pétrole au gas naturel, à l’or, au S&P500, etc.

On tradera ainsi un ou plusieurs marchés en même temps que le pétrole pour tirer parti des différences de prix.

A l’ouest rien de nouveau… Le pétrole WTI oscille dans la zone des $55 depuis plusieurs mois.

Les réductions de productions de l’OPEP (Organisation des pays exportateurs de pétrole - 14 pays membres dont les principaux sont l’Arabie Saoudite, l’Iran, l’Irak, les Emirats Arabes Unis, le Koweït, le Venezuela et le Nigeria) supportent un peu les prix, sans vraiment les propulser à la hausse. En fait, il y a pas mal de pétrole sur le marché…

Le support technique a été cassé en novembre 2018. Depuis on reste en dessous (cf ligne bleue inférieure sur le graphique).

D’un autre côté on peut dire que les prix se maintiennent malgré tout : il n’y pas de baisses violentes. En fait, il suffirait que les producteurs desserrent le bouchon pour les prix dégringolent. Ce n’est bien sûr pas dans leur intérêt, au contraire ils veulent vendre leur pétrole à un prix intéressant pour eux, rentable, sans non plus attirer trop l’attention… d’où cette zone entre $50 et $60 qui parait convenir à tout le monde.

Que s’est-il passé sur le pétrole depuis 1 mois ?

Les querelles USA - IRAN sont passées par-là. Les cowboys américains ont assassiné le Général iranien Soleimani. Les Iraniens ont riposté…

Le pétrole américain (WTI) a eu une poussée jusque $65… avant de redescendre en-dessous des $60 actuellement… alors même qu’on craint une guerre !

Bref, tout ça pour dire que même avec ces tensions géopolitiques, ça ne suffit pas pour maintenir le pétrole à un prix élevé.